Gellée, Claude, dit Le Lorrain (1600-1682)

Scène de naufrage, vers 1630
Huile sur bois, 55 x 38 cm

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L’eau-forte de Claude Gellée.

Claude Gellée a été formé à Rome chez Agostino Tassi, peintre maniériste qui appréciait les représentations de tempêtes par des flamands comme Paul Bril, Adam Elsheimer et Bonaventura Peeters. Le motif du bateau en train de sombrer et du gros rocher surmonté d’une tour en ruines était alors couramment exploité. Il symbolisait la traversée de la vie, ou encore le besoin pour une femme de trouver par le mariage un port d’attache. Claude Gellée s’inscrit d’abord dans cette tradition, loin des vues portuaires très classiques qui l’ont rendu célèbre. Dans une eau-forte qui nous a servi à réaliser cette peinture, les historiens d’art pensent qu’il avait reproduit un tableau maintenant disparu exécuté pour Giordano Orsini dont la devise était contra ventos et undas, « contre vents et marées ».

      Cette œuvre fait partie des tableaux qui ont été perdus à jamais. Claude Gellée produit une gravure à partir d’une oeuvre qu’il projette ou d’après une peinture qui a existé. Nous avons donc affaire à une présence spectrale. Ce tableau a-t-il au moins un jour existé ? Rêve d’image. Nous devons rendre à la gravure son modèle. Cette peinture est une restitution, celle d’un tableau énigmatique. Mais c’est l’oubli qui l’a définitivement détruite.

      C’est là une œuvre de jeunesse de l’artiste encore marqué par l’aspect fantastique des peintures flamandes de paysage. Nous avons cherché à respecter les divisions artificielles de la couleur : le bleu pour l’horizon, le gris-vert pour la région intermédiaire, le brun pour le premier plan. Les silhouettes sombres s’opposent aux tons plus clairs des flots tumultueux pour entraîner le regard vers des lointains vaporeux par des jeux de contre-jour typiques des œuvres d’Elsheimer.

(c) Daniel Lagoutte