Saint Matthieu et l’ange, vers 1602, huile sur toile, 232 x 183 cm
Le clergé de Saint-Louis des Français à Rome avait commandé ce tableau au Caravage. Le tableau est refusé en raison de la vulgarité du personnage jugé comme étant un rustre aux pieds sales. Une seconde version sera acceptée. Cette première version de saint Matthieu avec l’Ange a été achetée par le Marquis Vincenzo Giustiniani. Le tableau a ensuite été emporté à Berlin, où il a été vendu en 1815 au Friedrich Museum.
En 1941, les nazis construisent cinq tours dans Berlin pour protéger la ville contre d’éventuels raids aériens. Sous l’une d’elles, ont été enfermées pour raison de sécurité des œuvres du musée de Berlin, dont le fameux Saint Matthieu du Caravage. En mai 1945, les Russes ont pilonné ce bunker, mais les Allemands l’ont incendié et l’ont fait exploser. En fin de compte les Russes, ne pouvant rien récupérer des œuvres ensevelies là, ont recouvert l’ensemble de gravats. Ce qui en fait une colline de 45 mètres aujourd’hui boisé qui se nomme le parc Friedrichshain.
Aucune reproduction colorée n’existe de ce tableau disparu.
Le Caravage utilise une harmonie colorée bien spécifique fondée sur un bleu vert et un rouge. Pas de décor. La lumière hiérarchise les éléments déterminants du sujet. Il semble évident que l’artiste a utilisé une chambre noire pour la mise en place de sa composition. Les figures fortement éclairées posaient devant l’objectif de l’appareil, ce qui permettait de tracer les contours avec assez de précision pour créer cet effet puissant de présence des personnages. Nous avons apprécié de traduire l’opposition entre l’attitude gracieuse de l’Ange, comme en sustentation au-dessus du sol et la gaucherie de l’évangéliste, bien attaché à la matérialité, appliqué à transcrire ce que l’Ange lui dicte. Pour impressionner le spectateur, il a paru nécessaire de travailler la restitution dans des dimensions voisines de celles du tableau original.
(c) Daniel Lagoutte