Raphaël (1483-1520)

Portrait d’un jeune homme, vers 1513-1514, huile sur panneau, 59 x 75 cm

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Restitution du tableau disparu.

          Certains historiens pensent que ce tableau disparu serait en fait un autoportrait de Raphaël. Et c’est ce qui en fit sa renommée. Il est caractéristique du style de Raphaël : à la fois dédain et courtoisie animent le visage.

            Ce tableau disparu était autrefois conservé au Musée Czartoryski à Cracovie. En septembre 1939, il fut récupéré par le gouverneur nazi de Pologne Hans Frank pour décorer son chalet de Neuhaus. C’est là qu’il a été vu pour la dernière fois en janvier 1945. Frank fut pendu sans avoir pu indiquer où se trouvait la peinture considérée aujourd’hui comme définitivement perdue.

            Voici le tableau en train de brûler dans une mine de sel située en Allemagne, où il aurait été transporté. Cette photo fait partie d’une reconstitution historique au cinéma (Monuments Men de Georges Clooney, 2014).

            Pour reconstituer l’aspect de l’original, on ne disposait que d’une ancienne photographie reproduisant partiellement ce tableau disparu. Nous avons restitué la dimension originelle en partant du fait que l’œil gauche du modèle est situé sur l’axe vertical du panneau (comme c’est le cas pour les portraits de Léonard de Vinci).

            Dans ce travail, il s’agit de montrer que le personnage respire. Pour cela, nous allons, comme Raphaël, jouer sur des rapports duels :

        Rapports de couleurs froid/chaud : les couleurs froides (noir, bleus, gris) servent à traduire la chaleur de la fourrure.

        Rapports formels : La chevelure rappelle la ligne des arbres du paysage. On se souvient qu’en évoquant la Gaule très boisée, Jules César l’avait nommée « la Gaule chevelue ».

      Rapports rythmiques : La masse de cheveux située à gauche du visage, qui part horizontalement pour descendre presqu’à la verticale, dessine un cadre qui met en évidence la subtilité des traits du visage. Raphaël applique le principe de contrepoint cher aux artistes de l’époque ; au contour peu découpé et statique de la figure du côté droit répond un ensemble d’éléments expressifs du côté gauche.

    Rapports devant/derrière : Le paysage implique une focalisation lointaine, le portrait, une focalisation rapprochée, le mur le point intermédiaire ; les horizontales invitent à établir cette relation. Un autre détail confirme cette intention : le nœud du lacet placé au poignet, il ressort derrière un pli de la manche. Le regard du spectateur est invité à effectuer des mises au point successives pour percevoir ce que l’artiste traduit : les mouvements de l’âme. Le motif respire… Raphaël connaissait ce texte de Pétrarque dont le contenu a inspiré notre travail : « Les gestes animés des images exangues et les mouvements des figures immobiles semblent jaillir de leurs cadres et les traits expirants des visages te tiennent en haleine, comme si tu t’attendais plus ou moins à ce que leur voix en jaillisse aussi. »

 

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Voici le tableau en train de brûler dans une mine de sel située en Allemagne, où il aurait été transporté. Cette photo fait partie d’une reconstitution historique au cinéma (Monuments Men de Georges Clooney, 2014).

 (c) Daniel Lagoutte